Samedi 4 avril : Les volcans du Vanuatu.
Aujourd’hui, c’est le WE, je vous propose donc de partir en voyage un petit peu plus loin que ces derniers jours pour voir la géologie qu’il s’y passe. Quitte à s’évader, autant partir loin : c’est parti pour la géologie des volcans du Vanuatu !
L’archipel du Vanuatu se situe à 500 km au nord-nord-est de la Nouvelle-Calédonie. Il se compose de 80 iles d’origine volcanique appartenant à la ceinture de feu du Pacifique. Qu’elle est cette fameuse ceinture de feu du Pacifique ?
Et bien, c’est une zone de 40 000 km de long qui fait tout le tour du Pacifique et qui se caractérise par une très grande concentration de volcans (https://fr.wikipedia.org/wiki/Ceinture_de_feu_du_Pacifique) et une forte activité sismique. Certains de ces volcans sont célèbres, tels que le mont Fuji ou le Chimborazo. Pourquoi une telle concentration de volcans autour du Pacifique ?
Et bien parce que l’océan pacifique est en train de plonger dans le manteau sur tout son périmètre. En effet, les parties anciennes de ce très grand océan (il recouvre 1/3 de la surface de la Terre) ont suffisamment refroidi pour atteindre la densité critique qui leurs permet de replonger en profondeur dans le manteau : c’est ce que l’on appelle une subduction.
À la verticale d’une subduction, le fléchissement de la lithosphère océanique entraine le développement d’une zone relativement étroite, mais très profonde, que l’on appelle une fosse océanique. La plus célèbre de ces fosses océaniques est la fosse des Mariannes qui approche les 11 km de profondeur, point le plus profond de la surface du Globe. Ces fosses apparaissent très bien sur google maps (ce sont les zones les plus sombres https://goo.gl/maps/zBu2uM3FXqUuZhHu5) et nous pouvons les suivre sur l’ensemble de la ceinture de feu du Pacifique.
Mais comment ces subductions océaniques sont-elles reliées au volcanisme de la ceinture de feu du Pacifique ? En effet, la lithosphère océanique qui plonge est plutôt froide, elle devrait donc être relativement résistante à la fusion ?
Effectivement, le volcanisme de la ceinture de feu du Pacifique est lié à la subduction, mais ce n’est pas la lithosphère océanique elle-même qui fond. Pour comprendre ce qu’il se passe, revenons un petit peu en arrière : lors de la subduction d’une lithosphère océanique, l’augmentation de la pression et de la température entraine toute une série de réactions métamorphiques, nous en avons abondamment parlé hier et avant-hier au sujet des Schistes Bleus de l’ile de Groix et des Éclogites de Vendée.
Lors de ces réactions métamorphiques, la cristallisation de nouveaux minéraux (comme le Glaucophane) va libérer de l’eau qui se trouvait dans le réseau cristallin des minéraux précédents (les minéraux du métamorphisme hydrothermal). Cette eau va alors se retrouver dans le manteau environnant. Celui-ci, habituellement solide (ductile, pour être exact), va alors se déstabiliser en raison de la présence d’eau et commencer à fondre. C’est exactement le même processus que vous utilisez quand vous rajoutez de l’eau au sucre pour faire du caramel ! (pour les moins cuisinier d’entre vous, la recette est ici : https://www.marmiton.org/…/recette_caramel-liquide_24324.as… ;-).
Nous avons donc une subduction, marquée par la présence de fosses océaniques, sur tout le pourtour du Pacifique. Cette subduction entraine toute une série de réactions métamorphiques qui libèrent de l’eau et hydratent le manteau. Cette hydratation déstabilise le manteau environnant qui commence alors à fondre. Le magma ainsi formé remonte alors vers la surface où il forme les volcans que nous retrouvons sur l’ensemble de la ceinture de feu du Pacifique, et donc, au Vanuatu, où ont été prises les photos qui illustrent cet article.
Les photos qui illustrent cet article ont été prises par Michel H., adhérent du Centre de Géologie de l’Oisans. Elles ont été prises sur l’ile d’Ambrym et l’ile de Tanna dans l’archipel du Vanuatu et sont publiées avec son aimable autorisation. Je lui laisse la parole pour commenter ses photos :
L’ile d’Ambrym (https://goo.gl/maps/yEMZZqVY1HrzWGVD8) est à elle seule un volcan coiffé d’une grande caldeira de plus de 12 km de diamètre au sein de laquelle se sont construits plusieurs édifices volcaniques dont le Bembow et le Marum. Chacun d’eux contenait lors de notre voyage un lac de lave. Je ne sais pas si ces lacs de laves sont toujours présents.
Au Bembow, pour voir le lac de lave il faut descendre dans le cratère sur la première terrasse, le but étant d’y rester jusqu’à la nuit tombée afin de profiter au mieux du spectacle.
Le Marum quant à lui est un peu plus difficile d’accès, en tout cas, il ne permet pas une approche aussi près du lac de lave. De plus, le cratère était totalement envahi d’émanations volcaniques et le lac n’était visible que par brefs instants. Par contre, il est plus grand que celui du Bembow et sa surface était agitée en permanence de courants de convection.
L’ile de Tanna (https://goo.gl/maps/2CxYL38yzKrJPg4j9) quant à elle abrite le volcan Yasur en activité strombolienne permanente à raison d’une explosion toutes les 3 à 5 minutes. Au sein du cratère se trouvaient trois bouches éruptives qui donnaient chacune des explosions, parfois simultanées. C’était assez gigantesque ! Chaque explosion fait trembler tout le sol sous nos pieds et emplit l’air d’un vacarme assourdissant. L’archipel du Vanuatu fut découvert par James COOK dans la deuxième moitié du 18ème siècle et l’on sait que depuis cette époque au moins le Yasur est actif.
Jonathan Mercier, Docteur en Sciences de la Terre et Accompagnateur en moyenne montagne.
PS : Les plus géologues d’entre vous auront peut être remarqué que dans le cas précis de la fosse des Nouvelles-Hébrides (ou fosse du Vanuatu), ce n’est pas la plaque pacifique qui plonge, mais la plaque australienne. En effet, la géodynamique de la région est très complexe avec de nombreuses microplaques et des zones de relais en décrochement. Mais, quelle que soit la plaque qui plonge, le processus à l’origine du volcanisme reste le même !
J’ai initialement publié ce texte sur la page Facebook du Centre de Géologie de l’Oisans.